Pension alimentaire

Articles de droit de Maître Caroline Yadan-Pesah sur la Pension alimentaire

Pension alimentaire : y avez-vous droit pour vos enfants ? Si oui, comment la calculer et que faire en cas d’impayé ?

A la naissance d’un enfant, naît également une obligation pour les parents de contribuer à son entretien et à son éducation. La séparation des parents n’élimine pas cette obligation qui constitue un droit pour l’enfant.

Si vous avez des enfants, que vous allez vous séparer de votre conjoint ou partenaire ou que vous l’êtes déjà, et que vous n’êtes pas dans la même situation financière, l’un d’entre vous (le débiteur de l’obligation alimentaire) devra verser une somme d’argent au parent qui en a la garde (le créancier de la pension) pour contribuer financièrement à l’éducation et à l’entretien de vos enfants.

Qu’est-ce qu’une pension alimentaire ?

La pension est la contribution financière du parent à tout ce qui est nécessaire à la vie, à l’entretien et l’éducation des enfants au quotidien.

La pension contribue à payer les charges liées à la vie quotidienne et mais également à des frais particuliers ou exceptionnels liés à l’enfant. Elle peut donc porter sur la nourriture, les loisirs, le logement, les frais médicaux, les études, etc.

Attention, la pension alimentaire pour les enfants n’est pas équivalente à la prestation compensatoire ou à la pension alimentaire versée au conjoint qui peut être fixée en cas de divorce. En effet, la pension alimentaire pour les enfants n’est pas liée au mariage des parents mais à l’entretien des enfants.

La pension alimentaire peut être versée à son débiteur sous diverses formes : directement en argent par chèque ou virement ou en payant certaines dépenses alimentaires de l’enfant.

L’obligation alimentaire est, par essence, liée à l’enfant et à sa vie. Les parents des enfants nés hors mariage ou au cours d’un pacs ont comme les autres droit au versement d’une pension alimentaire.

Elle est le plus souvent due au parent chez lequel l’enfant réside habituellement ou toute autre personne ayant l’enfant à sa charge (un tuteur, un grand parent ou autres).

Si l’enfant est hébergé en garde alternée, le parent dont les revenus sont les plus faibles et qui peut prouver que la pension alimentaire permettrait d’équilibrer les conditions de vie de l’enfant peut bénéficier du versement de la pension.

Le débiteur de la pension pourra également demander à verser la pension directement à l’enfant résidant seul mais encore dépendant financièrement.

La pension alimentaire pour l’enfant majeur

L’enfant majeur pourra de son propre chef, faire une demande de pension alimentaire que ses parents soient séparés ou non.

L’obligation d’entretenir et d’élever l’enfant, et donc de verser une pension alimentaire, se maintient jusqu’à ce que l’enfant soit indépendant financièrement et socialement.

La majorité de l’enfant en question n’a aucune incidence sur l’existence de l’obligation. L’enfant, s’il est encore étudiant, en recherche d’emploi, malade ou handicapé devra donc pouvoir compter sur le soutien financier de ses deux parents.

Si vous êtes séparés de votre ex conjoint et que votre enfant n’est pas encore indépendant financièrement, il a donc le droit à une pension alimentaire.

Comment est fixé le montant de la pension alimentaire ?

Le Ministère de l’Intérieur a rendu accessible au public un simulateur (*) permettant de faire une estimation du montant de la pension qui vous est due.

Ce barème n’est cependant qu’indicatif puisque chaque situation est particulière. En France la pension alimentaire moyenne est de 170€ par enfant et par mois.

Quand les parents sont d’accord entre eux

Pour calculer les montants concernés, les parents peuvent s’accorder entre eux sur le montant soit par convention parentale de leur propre initiative ou, au cours d’un divorce, dans une convention de divorce par consentement mutuel.

Une telle convention entre les parents peut être rendue exécutoire :

  • Par homologation du juge aux affaires familiales
  • Par authentification d’un notaire
  • Ou après délivrance d’un titre exécutoire de la Caisse des Allocations Familiales (CAF) ou de la Mutualité Sociale des Agriculteurs (MSA).

Cette démarche vous sera particulièrement utile en cas de problèmes futurs ou pour faire reconnaître vos droits par des organismes publics.

En cas de désaccords

S’ils doivent tous les deux contribuer à l’éducation et à l’entretien de l’enfant, il est fréquent que des désaccords s’élèvent sur le principe et sur le montant de la pension.

Les frais de scolarité et l’éducation des enfants, par exemple, font souvent naître de nombreux désaccords.

Comme les choix relatifs à l’éducation des enfants doivent en principe être fait d’un commun accord, les frais supplémentaires à ce qui est normalement accepté seront donc à la charge du parent qui en est à l’origine.

Si vous n’arrivez pas à trouver un accord, vous pouvez saisir le juge aux affaires familiales dont dépend votre domicile.

Le juge fixera le montant en prenant en compte :

  1. les ressources des deux parents,
  2. les besoins et les frais relatifs à l’entretien et l’éducation de l’enfant
  3. les modalités de résidence de l’enfant au jour où il statue.

Le juge n’est pas lié par le barème proposé par le ministère de l’intérieur.

Il fixera le montant de façon personnalisée après avoir étudié votre dossier et entendu vos arguments pendant l’audience.

La demande de pension peut se faire à tout moment avec ou sans l’intermédiaire d’un avocat, par courrier au juge aux affaires familiales ou sur le site du ministère de la Justice.

Il est ainsi possible de demander une pension alimentaire après avoir divorcé, qui pourra être fixée rétroactivement jusqu’à 5 ans en arrière.

Maître Caroline Yadan Pesah répondait lors de émission « C’est au programme » de Roland Perez sur FRANCE 2 à la question : « Puis-je demander une pension alimentaire après mon divorce ? »  en expliquant comment s’y prendre pour demander en justice l’attribution ou la révision d’une pension alimentaire pour les enfants :
Revoir l’émission : https://www.france.tv/france-2/c-est-au-programme/522941-diffuse.html

Comment obtenir la révision de la pension alimentaire ?

Le jugement prévoit en général une simple indexation de la pension alimentaire,  indexée sur le coût de la vie, et c’est au parent qui verse la pension alimentaire d’en indexer le montant une fois par an.

En plus de cette indexation « automatique », le montant de la pension alimentaire fixé initialement peut évoluer en fonction de votre situation personnelle ou professionnelle (nouvel emploi, perte d’emploi, nouvel enfant etc.), des besoins de votre enfant, ou de l’évolution du coût de la vie.

Le montant de la pension peut donc être révisé ou revalorisé du fait de ce changement de situation et ce, à tout moment.

La révision, elle, peut découler d’un accord à l’amiable entre les parents ou de l’intervention du juge aux affaires familiales.

Il est conseillé de faire appel à un avocat pour la fixation du montant de la pension ainsi que pour sa révision puisque ce dernier connait la procédure et la stratégie la plus efficace pour obtenir une pension équitable et effective.

Dans votre demande de révision du montant de la pension alimentaire, vous devez faire figurer :

  • Une copie intégrale de l’acte de naissance de l’enfant et du demandeur
  • Une copie de toute jugement ou ordonnance préalable pertinente
  • Et la preuve de l’élément nouveau ou du changement de situation.

Le juge pourra soit augmenter, soit diminuer, soit éliminer la pension alimentaire.

A noter : si vous versez une pension alimentaire, vous pouvez sous certaines conditions (*) déduire fiscalement de votre revenu global les sommes versées dans le cadre de votre obligation alimentaire (par exemple pour un enfant non compté à charge via une part fiscale).

Comment récupérer la pension alimentaire impayée ?

 

Si la pension n’est pas payée, le bénéficiaire peut engager dès la première échéance impayée une procédure de paiement direct auprès du procureur de la république ou de la Caisse des Allocations Familiales.

Une personne qui ne verse pas la pension alimentaire pendant plus de deux mois commet un délit d’abandon de famille passible d’une peine d’emprisonnement de deux ans au plus et de 15 000 euros d’amende au plus.

Si vous n’arrivez pas à payer la pension alimentaire pour vos enfants, il est donc important d’informer l’autre parent de cette difficulté, d’entamer une procédure de révision du montant de la pension mais également d’informer la CAF ou la MSA si votre dossier est déjà entre les mains de ces organismes.

Le règlement à l’amiable de ces difficultés est toujours favorisé s’il est possible, il est donc important d’être proactif.

Si votre ex-conjoint ne verse pas la pension telle qu’elle vous est due, vous pouvez mettre en œuvre plusieurs actions parallèles :

Une procédure de recouvrement des impayés

Si l’on vous doit une pension alimentaire, vous pouvez initialement rappeler à votre ex conjoint de régler les sommes dues en lui adressant une lettre de mise en demeure en recommandée avec avis de réception :

  • Lui rappelant ses obligations,
  • Lui demandant de régler les sommes dues et à échoir
  • L’informant d’un potentiel recouvrement forcé.

Vous pouvez également contacter l’agence pour le recouvrement d’impayés de pensions alimentaires qui relève de la CAF ou la MSA en produisant pour elle un titre exécutoire mentionnant le montant de la pension.

L’agence initiera la procédure de Garantie contre les Impayés des Pensions Alimentaires (GIPA) tout d’abord, une phase amiable avec votre conjoint, et en cas d’échec pourra mettre en œuvre des procédures d’aide au recouvrement des pensions alimentaires (Arpa) qui vous sont dues mais le montant sera limité aux sommes remontant aux 24 mois précédant leur action.

Vous pouvez également activer ces procédures par vous-même auprès du juge aux affaires familiales.

Parmi ces procédures, se trouve celle de paiement direct grâce à laquelle vous pourrez récupérer directement les sommes dues dans les six derniers mois et même des sommes à venir auprès de l’employeur, la banque ou le pole emploi de votre ex partenaire.

Pour cela, vous devrez vous adresser à un huissier de Justice de votre lieu de résidence en lui fournissant tout acte exécutoire lié à la pension et tous les renseignements sur le débiteur de la pension.

L’huissier de Justice devra alors notifier ces organismes de la demande de paiement direct par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. L’ensemble de la procédure sera à la charge de débiteur qui n’a pas payé.

Vous pouvez également activer la saisie sur la rémunération, sur les meubles ou bien sur les comptes bancaires de votre débiteur et ce pour des sommes dues depuis plus de 6 mois.

Vous pouvez également initier une procédure de recouvrement par le Trésor public qui agira à votre place mais gardera 10% des frais. Vous devrez adresser cette demande par lettre recommandée au procureur de la République du tribunal de grande instance dont dépend votre domicile.

Maître Caroline Yadan Pesah répondait lors de émission TV « A vos Cas » d’Yves Toledano à la question : « Que peut-on faire quand une pension alimentaire n’est pas payée ? » :  intervention de 2’20 à 5’33

L’Allocation de Soutien Familial (ou ASF)

En 2010, les Caisses des Allocations familiales ont versé l’allocation de soutien familial à 732 300 bénéficiaires pour un montant de 1,253 milliard d’euros.

Y avez-vous droit ?

Si vous élevez seul votre enfant et que vous n’êtes pas en couple, vous pouvez adresser à la CAF ou la MSA une demande d’allocation de soutien familial qui est versée à titre d’avance ou de complément sur la pension alimentaire qui n’est pas payée par l’autre parent.

Elle est due à partir d’un mois après la séparation des parents uniquement si le bénéficiaire réside en France et est célibataire.

L’ASF est une allocation d’un montant de 115,30 € par mois et par enfant ou alors égal à la différence entre la pension versée et le plafond de 115.30€. L’ASF totale est versée tous les mois tandis que l’ASF complémentaire est versée tous les trois mois.

Vous avez le droit d’office au versement de l’ASF pendant 4 mois. Au-delà de ce délai, il faut présenter un titre exécutoire ou un justificatif d’engagement de procédure pour fixer la pension alimentaire pour pouvoir bénéficier de l’ASF.

Il existe des exceptions à ce délai strict si l’autre parent de votre enfant est dans une situation socio-économique difficile ou dans une situation particulière (incarcération, handicap etc.).

Si vous vous mettez en couple, le droit à l’ASF se termine au bout de 6 mois quelles que soient les autres circonstances.

La CAF qui verse l’allocation peut se retourner contre le parent débiteur et récupérer jusqu’à 24 mois de pension non payée.

En cas de difficultés persistantes, faites-vous aider. Ne restez pas seul. Comme vous pouvez le constater les solutions sont nombreuses…

Si vous êtes confrontés à une telle situation ou que vous avez des doutes sur vos droits effectifs, n’hésitez pas à me contacter.

Besoin d’aide pour étudier votre situation personnelle ?

Contactez-moi

Caroline YADAN PESAH

Maitre Yadan Pesah, 47 bis, rue d’Orsel – 75018 PARIS – 01.42.52.78.91, avocat spécialisée en droit de la famille est à votre disposition et pourra vous guider avec vos enfants pour adopter la meilleure stratégie et vous aider à faire valoir vos droits.

(*) Références

 

 

En cas de désaccord entre les parents sur l’inscription des enfants dans le privé, qui doit payer les frais de scolarité ?
La Cour de Cassation s’est prononcée sur le sujet le 22 mars 2012 dans la décision reproduite plus bas.

Cet article a été initialement publié sur le blog Legavox de Caroline Yadan Pesah, où il a généré depuis sa publication plus de 2400 vues.

En l’espèce, une femme reprochait à son ex-mari de ne pas participer aux frais de scolarité alors même que celui-ci s’était expressément opposé, au regard de sa situation financière, à l’inscription de l’enfant commun dans une école privée.

La mère poursuit le père pour le paiement de plus de 38 000 € à ce titre.

La Cour d’appel avait rejeté les demandes de la mère, au motif que le père s’était opposé aux choix à l’origine de ces dépenses, parmi lesquels l’inscription dans une école privée et des séjours à l’étranger.

Or, s’il est entendu que les parents doivent contribuer aux frais de scolarité, les choix qui font naître ces frais doivent être pris d’un commun accord.

La Cour de Cassation confirme cet arrêt d’appel.

Cour de Cassation Civ. 2ème, 22 mars 2012

« LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X… a été condamné à payer diverses sommes à Mme Y…, au titre de la contribution aux charges du mariage, puis du devoir de secours dû au conjoint et de la pension alimentaire pour l’enfant commun, enfin de la prestation compensatoire, de la contribution à l’entretien et à l’éducation de cet enfant et à titre de dommages-intérêts ; que Mme Y… a engagé à son encontre une procédure de paiement direct puis une procédure de saisie des rémunérations, en vertu des titres exécutoires fixant la contribution aux charges du mariage de décembre 2001 à mars 2003 et le devoir de secours d’avril 2003 à décembre 2006 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Mme Y… fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande de remboursement de frais de scolarité de l’enfant commun alors, selon le moyen :

1°/ que le juge statuant en matière de saisie des rémunérations n’a pas le pouvoir de remettre en cause le titre exécutoire qui sert de fondement aux poursuites ou la validité des droits et obligations qu’il constate, notamment de modifier le dispositif de la décision qui sert de fondement aux poursuites ; que l’arrêt du 21 mars 2006 s’était contenté de déclarer, tant dans son dispositif que dans ses motifs, que le mari devait prendre en charge les frais de scolarité de l’enfant Alexis jusqu’à la fin de ses études supérieures ; qu’en subordonnant néanmoins la prise en charge de l’établissement et de l’organisation de cours particuliers et de séjours à l’étranger à l’accord préalable du mari, quand cet accord n’était aucunement prévu ni dans les motifs ni dans le dispositif du titre servant de fondement aux poursuites, la cour d’appel a violé l’article L. 311-12-1 du code de l’organisation judiciaire, ainsi que les articles L. 3252-6 et R. 3252-1 du code du travail ;

2°/ que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que, en cause appel, Mme Y… détaillait toutes les sommes dues au titre de la scolarité de l’enfant Alexis et produisait toutes les pièces justificatives correspondant à ces sommes ; qu’en retenant qu’en l’absence d’éléments suffisants sur la somme réellement due par le mari au titre des frais de scolarité, il convenait de ne pas retenir ces sommes dans le calcul de la saisie des rémunérations, sans examiner les éléments de preuve fournis par elle pour justifier les frais de scolarité, la cour d’appel a violé les articles 455 du code de procédure civile et 1353 du code civil ;

Mais attendu que si le juge de l’exécution ne peut, sous le prétexte d’interpréter la décision dont l’exécution est poursuivie, en modifier les dispositions précises, il lui appartient d’en fixer le sens ;

Et attendu que c’est par une interprétation nécessaire de la précédente décision que la cour d’appel a souverainement décidé que la prise en charge des frais de scolarité de l’enfant commun était subordonnée à l’accord des parents ;

D’où il suit que le moyen, inopérant en sa seconde branche, n’est pas fondé pour le surplus ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que Mme Y… fait grief à l’arrêt d’exonérer M. X…, débiteur de dettes d’aliments, de la majoration de cinq points du taux de l’intérêt légal et de ne le condamner, en conséquence, qu’au paiement des intérêts au taux légal alors, selon le moyen, que le débiteur d’aliments ne bénéficie pas de l’exonération de la majoration de cinq points du taux de l’intérêt légal ; qu’après avoir constaté que les dettes litigieuses consistaient pour l’essentiel en des dettes d’aliments puisqu’elles portaient sur des pensions alimentaires et la prestation compensatoire, l’arrêt attaqué ne pouvait pas exonérer le débiteur de la majoration de cinq points du taux de l’intérêt légal ; qu’en s’abstenant de tirer les conséquences légales de ses constatations, la cour d’appel a violé les articles L. 313-1 du code monétaire et financier et 1244-1 du code civil ;

Mais attendu qu’aux termes de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier, qui s’applique aux dettes d’aliments à défaut d’exclusion expresse, le juge de l’exécution peut, à la demande du débiteur ou du créancier, et en considération de la situation du débiteur, exonérer celui-ci de la majoration du taux de l’intérêt légal ou en réduire le montant ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Mais sur le deuxième moyen, qui est recevable :

Vu l’article 1244-1 du code civil ;

Attendu qu’après avoir constaté que la demande avait été engagée sur le fondement de titres exécutoires fixant la contribution aux charges du mariage puis le devoir de secours, l’arrêt énonce qu’au regard des facultés contributives du débiteur et de la nécessité pour Mme Y… de percevoir régulièrement la pension alimentaire et la prestation compensatoire courantes, il convient d’accorder à M. X… un délai de deux ans pour s’acquitter de sa dette ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’article 1244-1 du code civil exclut son application aux dettes d’aliments, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a accordé à M. X… des délais de paiement, l’arrêt rendu le 25 novembre 2010, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris ;

Condamne M. X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille douze. »

 

Maître Caroline Yadan Pesah,
Avocate en Droit de la Famille et Affaires familiales à Paris 18e

Les collectivités publiques peuvent agir au nom et place d’un créancier d’aliment lorsque cette action est en lien avec une demande d’aide sociale : on parle d’action subrogatoire. En l’espèce, un département accorde une aide sociale à un homme et demande à ce que la somme due par le fils à son père au titre des aliments soit fixée. Le juge le déboute, estimant que l’état de besoin du père n’est pas établi, étant entendu qu’il dispose d’un patrimoine immobilier.

La Cour de Cassation confirme cet arrêt de la Cour d’appel. Elle retient que, même lorsqu’elle est exercée par le département, la demande d’aliment suppose une appréciation de l’état de besoin selon les dispositions du Code civil. Or, l’article 208 du Code civil dispose que : « Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit. ». A cet égard, les règles d’attribution de l’aide sociale n’a donc pas d’incidence.

Civ. 1ère, 4 nov. 2015

« Mais attendu que, quelles qu’en soient les modalités, et alors même qu’il s’agirait du recours prévu par l’article L 132-7 du code de l’action sociale et des familles, l’action exercée contre un débiteur d’aliments a toujours pour fondement les dispositions du code civil régissant la dette d’aliments, et notamment l’article 208 du code civil selon lequel les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame et de la fortune de celui qui les doit ; que la cour d’appel en a exactement déduit que cette appréciation n’est pas soumise aux règles d’attribution de l’aide sociale ;

Et attendu que c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation, que, par motifs propres et adoptés, après avoir constaté que Roland B. disposait d’un patrimoine immobilier, la cour d’appel a estimé, prenant en considération à juste titre les revenus que pourrait lui procurer une gestion utile de son patrimoine, et sans faire peser de responsabilité sur le département, que l’état de besoin du créancier d’aliments n’était pas démontré ; »

Maître Caroline Yadan Pesah,
Avocate en Droit de la Famille et Affaires familiales à Paris 18e

Civ 1 4 octobre 2017 16-15.815

Selon cet arrêt, le Juge aux affaires familiales apprécie l’état de besoin du créancier alimentaire et la faculté de contribution des débiteurs alimentaires au jour où il statue. La règle « Aliments ne s’arréragent pas » contraint le juge à fixer le point de départ de l’obligation alimentaire.

En l’espèce, suite à l’intervention de l’assistance sociale de secteur et du maire de la commune, le juge des tutelles a placé une femme en tutelle et a confié la mesure de protection juridique à l’Union départementale des associations familiales de la Haute Vienne. L’état du logement de cette femme de cette femme, sa santé et son isolement ont conduit à la placer en hébergement en EHPAD. Cependant, ses pensions de retraite ne lui permettaient pas de faire face à cette nouvelle dépense, créant un déficit mensuel de 572, 39 euros.

Le tuteur a pu obtenir la condamnation judiciaire des deux petits fils de la tutélaire à lui payer une pension alimentaire pour l’avenir ainsi que le versement d’un arriéré de 2040 euros, réparti de façon inégalitaire sur les deux petits fils. Pour justifier l’arriéré courant à compter de septembre 2013, l’arrêt confirmatif retient que l’UDAF n’est pas restée inactive et a agi contre les débiteurs d’aliments avant de les assigner en justice le 3 février 2014. L’arrêt est cassé au visa de l’article 208 du Code civil, ensemble la règle « aliments ne s’arréragent pas ». La violation de la loi est caractérisée dès lors que la première demande de contribution résultait d’une lettre recommandée du 25 octobre 2013.

L’arrêt de cassation s’inscrit dans une jurisprudence constante : le point de départ de l’obligation alimentaire remonte, en principe, au jour où le juge est saisi. Par exception, la cour de cassation accepte de prendre en considération la première demande comminatoire, formée par une lettre recommandée avec accusé de réception. L’arrêt rappelle alors aux mandataires judiciaires à la protection des majeurs qu’ils doivent agir avec diligence et sérieux.

L’arrêt de cassation illustre également le fait que les petits enfants ne sont pas à l’abri d’une action alimentaire engagée au profit de leurs grands parents. Le demandeur n’est pas contraint d’assigner en justice tous les obligés alimentaires, mais il est de bonne pratique que les MJPM les assignent tous, laissant au juge le soin de répartir le montant de la dette proportionnellement aux facultés contributives de chacun. La prise en considération des ressources et charges de chacun des obligés alimentaires est un obstacle à la solidarité passive et à la condamnation in solidum.

Maître Caroline Yadan Pesah,
Avocate en Droit de la Famille et Affaires familiales à Paris 18e

Lorsqu’un enfant verse une pension à ses parents, celle-ci n’est déductible qu’à la condition que cette pension soit alimentaire, c’est-à-dire que les parents sont dans le besoin. A cet égard, le Conseil d’Etat précise que cet état de besoin doit s’apprécier sans égard pour la donation que le parent a pu faire à son enfant antérieurement, à l’exclusion des cas frauduleux. Autrement dit, le fait que le parent se soit volontairement privé de revenus fonciers en faisant donation sans contrepartie d’un bien immobilier à son enfant ne permet pas au juge de déduire que le parent n’est pas dans le besoin.

C’est la première fois que le Conseil d’Etat se prononce sur l’appréciation de l’état de besoin d’un parent qui s’est volontairement privé de revenus par une donation sans contrepartie. En l’espèce, la solution apparaît d’autant plus logique que la mère a fait donation à son fils de la nue-propriété de ses biens immobiliers tout en se réservant l’usufruit.

« Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 octobre 2008 et 5 janvier 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. François A, demeurant … ; M. A demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 3 juillet 2008 par lequel la cour administrative d’appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l’annulation du jugement du 23 octobre 2007 du tribunal administratif de Dijon rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2001, 2002 et 2003 et des pénalités correspondantes ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Nicolas Labrune, Auditeur,

– les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. A,

– les conclusions de M. Julien Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. A ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A a déduit de son revenu global au titre des années 2001, 2002 et 2003 respectivement les sommes de 7 409 euros, 15 644 euros et 13 179 euros correspondant aux pensions alimentaires versées à sa mère ; que l’administration fiscale, estimant que l’état de besoin de la bénéficiaire n’était pas établi et que ces sommes pouvaient en outre être la contrepartie du logement de M. A chez sa mère, les a réintégrées dans le revenu imposable de M. A ;

Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu’en vertu du 2° du II de l’article 156 du code général des impôts, sont seules déductibles pour la détermination du revenu net imposable les pensions alimentaires  » répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211 du code civil  » ; qu’aux termes de l’article 205 du code civil :  » Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin  » et qu’aux termes de l’article 208 du même code :  » Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame (…)  » ; qu’il résulte de ces dispositions que les contribuables qui déduisent ou demandent à déduire du montant global de leurs revenus, pour l’assiette de l’impôt sur le revenu, les versements qu’ils ont fait à leurs parents privés de ressources doivent justifier devant le juge de l’impôt de l’importance des aliments dont le paiement a été rendu nécessaire par le défaut de ressources suffisantes de leurs ascendants ; que, dans le cas où le créancier des aliments a préalablement consenti une donation de biens immobiliers au profit du contribuable débiteur des aliments, sans contrepartie explicite, le juge de l’impôt n’est fondé à prendre en considération, pour apprécier l’état de besoin des ascendants, les ressources dont ceux-ci se sont volontairement privés en faisant cette donation qu’en cas de fraude à la loi ;

Considérant que si, pour apprécier l’état de besoin de la mère de M. A, la cour administrative d’appel de Lyon a notamment pris en considération, par adoption des motifs du jugement rendu en première instance, la circonstance que l’intéressée avait fait don à son fils, sans contrepartie, de la nue-propriété de deux immeubles ainsi que de bois et de prés, elle n’a recherché ni si ces donations et les versements ultérieurs de pensions alimentaires effectués par M. A révélaient une fraude à la loi ni si l’intéressée était dans un état de besoin après ces donations ; qu’ainsi, M. A est fondé à soutenir que la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit et à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;

Considérant qu’il y a lieu de mettre à la charge de l’Etat le versement à M. A de la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :
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  • Article 1er : L’arrêt du 3 juillet 2008 de la cour administrative d’appel de Lyon est annulé.
  • Article 2 : L’affaire est renvoyée à la cour administrative d’appel de Lyon.
  • Article 3 : L’Etat versera une somme de 3 500 euros à M. A en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
  • Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. François A et à la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’Etat, porte-parole du Gouvernement. »

 

Maître Caroline Yadan Pesah,
Avocate en Droit de la Famille et Affaires familiales à Paris 18e

Le communiqué du ministère de la Justice du 18 avril 2012 publie des statistiques qui montrent que les pensions alimentaires accordées par les juges sont très proches de ceux obtenus par application du barème du Ministère de la Justice de 2010. Ainsi, le montant moyen alloué pour le premier enfant est de 200€ et de 195€ pour le deuxième.

On remarque toutefois que les juges  tendent à fixer un montant légèrement supérieur à ceux préconisés par le barème lorsque les revenus du débiteur sont inférieurs à 2000€ mensuels. A l’inverse, ils tendent à fixer un montant légèrement inférieur lorsque les revenus du débiteur sont supérieurs à 2000€ mensuels.

Cet article a été initialement publié sur le blog Legavox de Caroline Yadan Pesah, où il a généré depuis sa publication près de 2000 vues.

Lorsqu’un couple divorce et que l’écart de revenus entre les conjoints est significatif, l’époux le mieux loti peut se trouver dans une situation où il doit :

  • Au cours de la procédure de divorce, verser une pension alimentaire au conjoint dans l’état de besoin,
  • A l’issue de la procédure de divorce, verser une prestation compensatoire, dont l’objectif est de venir équilibrer les situations des deux époux.

La pension alimentaire versée au conjoint n’a qu’un caractère provisoire car elle cesse d’être due lorsque le divorce est devenu définitif.

A l’inverse, l’article. 271 du Code civil précise que la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l’époux à qui elle est versée et les ressources de l’autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible

pour plus de précisions : Calcul de la prestation compensatoire – méthodes d’évaluation.

Le moment du calcul rend donc impossible la comptabilisation de la pension alimentaire dans le calcul de la prestation compensatoire. Sur ce fondement, la Cour de Cassation casse un arrêt d’appel qui avait précisément pris en compte la pension alimentaire versée.

Civ. 1ère, 28 mars 2012

« LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant : 

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X… et Mme Y… se sont mariés le 19 juin 1978 à Khouriboa (Maroc), sans contrat préalable ; que par jugement du 20 février 2009, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Troyes a prononcé le divorce des époux X…- Y… à leurs torts partagés, statué sur l’autorité parentale de l’enfant encore mineur, condamné M. X… à verser à son épouse une prestation compensatoire d’un montant de 30 000 euros sous la forme d’un capital et la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l’article 1382 du code civil ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Mme Y… fait grief à l’arrêt d’accueillir la demande en divorce formée par M. X…, alors, selon le moyen, que les juges du fond ne pouvaient s’abstenir de rechercher si Mme Y… n’avait pas été contrainte de travailler comme serveuse en raison du comportement de son mari qui se montrait très violent avec elle et la privait de moyens financiers ; qu’ainsi, les juges du fond n’ont pas donné de base légale à leur décision au regard de l’article 242 du code civil ;

Attendu qu’en prononçant le divorce des époux X…- Y… à leurs torts partagés, les juges du fond ont nécessairement estimé que les faits imputables à l’épouse n’étaient pas excusés par le comportement de son conjoint ; que le moyen n’est pas fondé ;

Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche :

Vu les articles 270 et 271 du code civil ;

Attendu que, pour fixer à la somme de 30 000 euros le montant de la prestation compensatoire due à Mme Y…, l’arrêt retient que celle-ci a pour ressources la pension alimentaire versée par son mari de 700 euros par mois ;

Qu’en statuant ainsi, alors que cette pension ayant un caractère provisoire, ne peut être prise en compte pour fixer la prestation compensatoire due à Mme Y…, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, sans qu’il y ait lieu de statuer sur la première branche du second moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a fixé à la somme de 30 000 euros la prestation compensatoire due à Mme Y…, l’arrêt rendu le 26 mars 2010, entre les parties, par la cour d’appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Amiens ;

Condamne M. X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X… ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mars deux mille douze.»

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Caroline YADAN PESAH